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Une question con pour commencer : qui es-tu donc Olivier Goulet ?
Attends, je regarde sur Google pour te répondre (rire) non, sérieux, jen suis à ma quatrième mue, la cinquième mutation sera la bonne. Je suis en train de tout préparer, mais vu létat du monde actuellement, ya du boulot Ta création est centrée sur la question de l'humain, son corps, sa peau, etc., l'humain en général en tant que problème et matériau à la fois. Pourquoi cette inspiration principale ? Lhomme est à la fois ce qui est le plus proche de nous et de plus mystérieux. Dun point de vu individuel, cest ce corps qui nous sert dinterface de réception et d'intervention sur le monde. Il est le support de notre conscience qui est une des inventions les plus fabuleuses de la Nature. Dun point de vu collectif, lhumain révèle tout son paroxysme. Il est un être inabouti qui narrive pas à gérer ses pulsions et son affect. Son comportement est problématique, ce qui me pousse à espérer son évolution. Globalement
je me sers de ce qui est visible de lhomme pour parler de ses dysfonctionnements
internes. Pour
en revenir au rapport entre esthétique (plastique) et concept,
cest loin dêtre clair. Cest un binôme infernal,
à mes yeux les ingrédients indispensables pour faire une
pièce de qualité ; cela est bien sur valable dans tous
les domaines de lactivité humaine. Le concept est garant
de lintérêt cognitif dune approche ou dune
problématique, lesthétique permet la formulation adaptée
pour une réception optimale. Quand je dis optimal, ça na
rien à voir avec le beau, mais avec la compréhension intuitive
de lobjet. La peau révèle notre territoire identitaire. Elle est la membrane superficielle de notre intériorité, le paysage de notre identité. La peau délimite physiquement notre corps, et c'est finalement l'ultime frontière qui nous permet d'exister en tant qu'individu distinct du reste du monde. Cette enveloppe est une des composantes principales de notre identité, ce qui est à voir. Pour répondre plus précisément à ta question, je donne 3 exemples chronologiques : Vers 1994/96, jai fait plusieurs séries photographiques qui sintitulaient Mue, Mutation, Boîtes dinsectes anthropomorphes qui présentent lhomme comme une espèce en voie de disparition et insistent sur limpératif de changer de peau, cest à dire muter.
En 1997, je mettais en ligne un site de Vente de territoires par correspondance : jy vends les parcelles de peau numérisée dun SDF (Gilles Virget). De manière métaphorique, je voulais parler de la remise en cause de lintégrité humaine, de la fragmentation de lidentité, du commerce dorganes, du voyeurisme et du couple infernal proxénète / prostitué qui est une bonne grille de lecture du capitalisme libéral. En 2000, jai mis au point le SkinBag (SB), une peau humaine synthétique, avec laquelle je fabrique des sacs comme extension corporelle et des survêtements chargés de redéfinir le corps social. Contrairement à ce quon peut penser, le SB sintéresse avant tout, non pas à lêtre nu, mais à lêtre social qui se présente aux autres. Comme double peau, le SB propose une nouvelle forme paradoxale de nudité à notre corps, qui intègre désormais nos habits et nos extensions de tous ordres (argent, clés, téléphone, organizer ). Cette nouvelle peau permet de redéfinir les contours élargis de son personnage et de son image. Lautre aspect qui mintéresse avec le SB est daborder ce que lon appelle habituellement lhybridation homme/machine. Je préfère parler de la fusion de lorganique et de linorganique. Recouvrir nos machines (SB-computer ou le SB-pixels-banane ) dune peau organique est un premier pas symbolique vers lintégration de prothèses électroniques en superficie ou dans notre corps. Je nai jamais cru en un avenir aseptisé comme veulent nous le faire penser les environnements et les simulations en images de synthèse. Le monde de demain ne sera pas hyper clean. Nous néchapperons pas si vite à notre corps, à ce tas organique que nous sommes. Cest dans notre matière que se construit notre être : sang, chair, graisse, et toutes ces matières molles et complexes constituent le support qui nous permet daffronter le monde. Ce nest pas lorganique qui va devenir numérique, mais bien la technologie numérique qui va devenir organique. Puisquon
a glisser en hors sujet continuons puisque ça va dans le sens des
idées mutantes que vous énoncez. Si lon constate aujourdhui
que les appareils technologiques sont rendus obsolètes dès
leur conception, lhomme lui aussi est voué à disparaître
ou à accepter sa mutation pour sa survie individuelle et collective. Le SkinBag provoque par exemple des réactions qui vont de l'attirance irraisonnée de type passionnel au malaise, voire à la répulsion. Certains refusent carrément tout contact, voire toute discussion, tant ils se laissent dominer par leur dégoût. Dautres voient dans certains sacs des "placentas portatifs" et perçoivent les anses comme des cordons ombilicaux. La mollesse des sacs évoque la membrane, la muqueuse, des tissus bizarres de lintérieur de notre corps, la partie primaire, trouble, voire informe de nous-mêmes. Dautres personnes dépassent le malaise initial et trouvent ce type de détournement du biopouvoir intéressant. SkinBag
veut être un véhicule sensuel, il est conçu pour provoquer
lenvie de caresser. Ne pourrait-on pas comparer le SkinBag au sexe ?
Il nous attire instinctivement, mais peut pourtant paraître répugnant
par certains aspects
En
attendant jexploite le piercing, tatouage et scarification sur mes
SkinBag. Lavantage dune intervention sur une double peau est
de ne pas laisser de traces irréversibles sur le corps en ménageant
pourtant des effets comparables aux modifications corporelles. Cest
aussi un gage de liberté, car le corps de substitution est sans
limites. Les TCH sont une métaphore des relations complexes, troubles, de pouvoir et de désir qui existent entre les hommes. Ils nous renvoient à notre propre questionnement existentiel et interrogent nos relations aux autres. Lhomme est-il un chasseur ou une proie ? bien sûr les deux à la fois. Plus intéressant, comment peut-on se chasser soi-même ? Les TCH parlent autant de nos angoisses sous jacentes liées à notre finitude, que des liens étranges entre les individus . Ils nous interpellent parce quils abordent des problématiques toujours contemporaines : lhomme face à la mort, face à lui-même, face aux autres Se
référant explicitement au thème de la vanité,
ils sont un simulacre de plus qui nous donnent limpression de prolonger
notre existence au-delà de notre mort biologique, et lillusion
de transcender notre mort. Le concept " O " nous invite à imaginer une nouvelle donne identitaire et relationnelle. O marque lémergence dun humain optimisé. Cet être nouveau est connecté au monde, pour former un réseau pacifié. Le concept dhumanité se voit étendu : lindividu, partiellement libéré de son corps, est re-configuré en O : paramétrage relationnel optimisé, drivers dextensions corporelles, intégration de prothèses affectives, accroissement des taux de satisfaction, renforcement du mode jouissance, réduction des seuils dagressivité, amplification de la tolérance, et surtout élargissement de notre niveau de conscience Je
propose une perspective mutante au grand public, avec un média
qui leur est plus que familier, et je constate que les gens adhèrent
bien. En tout cas le clip me parait être un des meilleurs moyens pour communiquer. Je prépare aussi plusieurs micro clip sur des sujets dactualités pour donner mon avis à chaud.
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