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Ma princesse est née de ce crapaud rosâtre
(à propos de l'
installation : Arrête de respirer )

par

Bénédicte Lanot
lettre à Olivier Goulet, 1996


Peut-être un fil d'Arianne ? Le temps du tissage s'étire, et rien ne me garantit que je vais dénicher le centre.

Refaire sa peau – peau neuve – abandonner l'ancienne et en laisser trace transparente, irisée – traduit l'éblouissement de la naissance.
Lorsque ma fille est née, elle avait si longtemps oublié de naître, qu'elle portait autour d'elle comme une mue en haillon. Ma princesse est née de ce crapaud rosâtre. (Si vous saviez comme elle est belle.)

Vos mues émeuvent par les volumes dessinés si on pouvait les déployer, qu'on rêve d'éployer. Où l'on se prend à rêver sur ces images, votre rire nous rattrape : les plis de la mue deviennent des figures grotesques, le crapaud montre à nouveau son nez là où l'on avait cru apercevoir le souffle d'un ange. Les nourrissons hagards que nous sommes rampent comme ils peuvent.

Naître comme JE ? ou quand le devient-on ?

Glissements incessants du sens, logique onirique et archaïque, donc troublante. Vos mots-images épars et fragmentaires ont un pouvoir de métamorphose comme l'est le suc digestif des insectes :

L'ingestion pour s'approprier un objet. Expectorer pour ne pas le laisser disparaître.

Vos histoires sont habitées de lutins farceurs qui font la nique aux minotaures réduits à danser aux folies bergères.

Vos formes s'élaborent de façon inverse au projet de l'écriture. C'est peut-être la marque de votre rapport régressif aux choses que vous saisissez. Ce processus semble bien prendre son autonomie.

Variation sur le motif : tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or. Tu m'as donné ta bouse et j'en ai fait du sujet. Tu m'as doté d'organes dont je fais l'inventaire pour mieux les inventer, pour mieux me recomposer, en me dotant d'excroissances, de goitres qui recèlent de nouveaux visages.