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à propos de la pièce : les îles-respirations
de Olivier Goulet

par

Alain Bonfand (1993)
publié dans le catalogue de l'exposition Mastère 93


îles-marécages-respirations
Des lagons velus se meuvent lentement pour n'effrayer personne.
bois, latex peint en noir, fourure de renne, moteurs, minuterie
200x300 cm - 1992-93

Quand ils respirent, chaque fragment conquiert l'ambiguité qui le fait être et être les uns à côté des autres, ensemble, ces fragments. Ils "vivent" alors parce que le moteur caché sous la peau et le pelage lentement reproduit le souffle d'un corps mais aussi parce que le blanc du mur sépare chaque fragment. Il "vivent aussi surtout, parce que ces fragments gagent peu à peu une sorte d'incertitude de la reconaissance. Corps d'animal, île, archipel, on suppose que ce corps, cette terre était une, que la séparation, le rift, la rupture qui a provoqué l'éloignement est en fait l'articulation de ce travail. C'est pour cela que ces corps- archipel respirent. Cette construction en archipel de l'installation et le recours au pelage de renne font monde et assignent à l'oeuvre une géographie implicite. Il faut peut-être avoir vu l'ôs de Punkaharju en Finlande pour y songer, survolé cette région quend les arbres tremblent, que la terre paraît respirer. C'est d'ailleurs une des force en général du travail d'Olivier Goulet que d'inverser le vécu positionel, que la vue du ciel devienne frontale. On peut aussi penser aux esker d'Irlande qui sont dans leur pays éponymes des formes encore plus complexes, tantôt filiformes comme des os, tantôt dilatés et plates.

Il faut imaginer enfin que l'habitant de cette région d'une certaine manière la désigne, qu'il y ait une identité muette entre l'île et son habitant, que l'ôs, l'esker, le kame soit son habitant. Peu importe quand la main s'approche du pelage, le nom de cet animal, cela est doux, et l'ombre sur le mur de sa respiration plus douce encore. Naît alors une sorte de désir qui s'insinue, glisse invisiblement d'une île à l'autre. On peut croire alors que ces corps s'approchent les uns des autres, que l'ombre de leur respiration sur le mur les rapproches; qu'ils respirent pour se rapprocher.